De nouvelles avenues de recherche sur une maladie neurologique rare : Une équipe de recherche vise la progression de la recherche sur la leucodystrophie liée à l’ARN polymérase III et l’amélioration des soins aux personnes atteintes de cette maladie

Imaginez qu’on vous annonce que votre enfant est atteint d’une maladie cérébrale rare que les médecins commencent seulement à comprendre depuis un peu plus de dix ans. Cette maladie, pour laquelle il n’existe aucun traitement, prive progressivement les personnes qui en sont atteintes de capacités que la plupart d’entre nous considèrent comme acquises, telles que marcher, parler, voire manger. Pour les familles touchées par la leucodystrophie hypomyélinisante liée à l’ARN polymérase III (POLR3‑HLD), ce scénario est une réalité. Cependant, de nouvelles recherches dans le domaine des traitements à base d’ARN commencent à ouvrir des portes qui n’existaient pas auparavant.

Qu’est-ce que la POLR3-HLD?

La Dre Geneviève Bernard, clinicienne et chercheuse, se consacre à l’avancement des traitements et de la recherche sur la POLR3-HLD. Elle a reçu un financement de trois millions de dollars dans le cadre du programme Recherche à visée translationnelle D2R pour son projet intitulé Les traitements innovants à base d’ARN offrent un nouvel espoir aux personnes atteintes de leucodystrophie liée à l’ARN polymérase III. Les leucodystrophies sont un groupe de troubles cérébraux rares et héréditaires touchant la substance blanche, composée en grande partie de myéline. La myéline isole les cellules cérébrales (neurones), assurant leur protection et la transmission rapide des signaux. Les neurones, qui agissent comme des fils électriques dans notre organisme, sont entourés de myéline, qui forme une gaine protectrice, aidant les signaux à voyager rapidement et efficacement afin que le cerveau et le corps puissent communiquer correctement. En cas de leucodystrophie, la myéline ne se forme pas correctement pendant le développement du cerveau ou se forme normalement, mais se détériore plus tard. Les leucodystrophies apparaissent généralement pendant l’enfance et entraînent une aggravation des incapacités au fil du temps. Malheureusement, de nombreux enfants atteints de leucodystrophie ne survivent pas à la maladie.

La POLR3-HLD est une leucodystrophie héréditaire rare causée par des modifications des gènes qui produisent une enzyme importante appelée ARN polymérase III, qui aide à produire de petites molécules d’ARN, importantes pour la santé de nos cellules. Chaque cellule de notre corps fonctionne selon des instructions, comme lorsque nous utilisons un livre de recettes pour cuisiner. Pour un gène donné, l’ADN (le gène) produit l’ARN par un processus appelé transcription. Chez les enfants atteints de POLR3-HLD, des modifications (instructions nocives) dans les gènes qui composent une partie de l’ARN polymérase III l’empêchent de produire certaines petites molécules d’ARN essentielles au bon fonctionnement des cellules. En conséquence, dans le cerveau en développement, les cellules productrices de myéline sont incapables de former la gaine de myéline essentielle. Jusqu’à récemment, il y avait peu d’espoir de corriger les effets de ces instructions nocives, mais, grâce à la progression des traitements à base d’ARN, les scientifiques trouvent de nouveaux moyens de réparer l’effet délétère de ces instructions, offrant ainsi de l’espoir aux familles qui attendaient des réponses.

Différentes approches thérapeutiques au banc d’essai

L’équipe de recherche de la Dre Bernard étudie trois approches de mise au point de traitements à base d’ARN contre la POLR3-HLD. Tout d’abord, elle tente de réduire le nombre d’instructions nocives dans les cellules au moyen d’oligonucléotides antisens, de courts brins de matériel génétique qui se fixent aux instructions de l’ARN comme un guide et redirigent la lecture du message, soit en neutralisant les instructions nocives, soit en aidant la cellule à traiter correctement le message. Deuxièmement, l’équipe vise à restaurer la fonction d’un gène fréquemment muté, POLR3A, qui est un composant essentiel du mécanisme de l’ARN polymérase III de la cellule. Pour ce faire, elle cherche à remplacer les instructions ARN défectueuses par une copie saine de l’ARN du gène. Ces copies saines seront acheminées à l’aide de minuscules vecteurs à base de lipides appelés nanoparticules lipidiques. Enfin, elle explore des moyens de stimuler l’activité de l’ARN polymérase III, l’enzyme perturbée dans cette maladie, en réduisant un inhibiteur naturel de l’enzyme, comme si on levait le pied du frein qui la ralentit normalement.

Pour la Dre Bernard et son équipe, l’étude de trois approches différentes offre non seulement un filet de sécurité en cas d’échec d’une approche, mais ouvre également la voie à de nombreuses découvertes. Avec le soutien de la patientèle, des associations de défense des droits et des partenaires du secteur, l’équipe espère faire rapidement passer ces traitements prometteurs au stade des essais cliniques. Cependant, comme pour toute recherche, ce projet n’est pas sans difficulté. Les scientifiques sont encore à amasser des connaissances sur la POLR3-HLD, car les premières mutations responsables de la maladie n’ont été découvertes qu’en 2011. De plus, les essais cliniques sur les maladies rares présentent des difficultés sur le plan des coûts, du recrutement et de la sélection des participants et participantes. La Dre Bernard explique que la subvention D2R qu’elle a reçue a atténué certaines de ces difficultés : « Cette subvention nous donne les ressources nécessaires pour accomplir beaucoup de choses en peu de temps. Pour des scientifiques qui travaillent sur les maladies rares, c’est comme un rêve devenu réalité. »

Les familles au cœur de la recherche sur la POLR3-HLD

La Dre Bernard décrit son parcours l’ayant menée à l’étude des leucodystrophies comme un « heureux hasard ». Elle est fascinée par les casse-tête complexes que sont les troubles génétiques et leurs signatures distinctives sur les images par résonance magnétique (IRM). Elle compare leur caractère unique au profil caractéristique d’une ville. « Pour de nombreuses leucodystrophies, vous êtes en mesure de déterminer le diagnostic à l’aide d’une IRM en un seul coup d’œil, comme si vous regardiez la silhouette de Paris dans l’obscurité. En voyant les lumières de la tour Eiffel, vous vous dites “ça ne peut être que Paris” ». Suivant sa nouvelle passion, elle explique que, lors de ses stages en génétique, elle a ressenti une profonde compassion pour les familles confrontées à de tels défis et qu’elle était déterminée à leur fournir les meilleurs soins possibles. « C’est un privilège de pouvoir accompagner les familles tout au long de cette maladie très difficile. Je me sens utile lorsque j’écoute leurs histoires et que nous travaillons ensemble pour essayer de faire en sorte que leurs enfants soient aussi heureux que possible, aussi longtemps que possible. »

Les familles touchées sont au cœur des travaux de la Dre Bernard. Elle s’assure activement, aux côtés de sa patientèle et des associations de défense des droits, que les priorités de la recherche correspondent aux besoins des personnes atteintes de ces troubles. Elle explique que « l’interaction avec les patients, les patientes et leurs familles est essentielle à la mise au point de traitements qui leur sont adaptés. Ce que nous, scientifiques, considérons comme important peut ne pas l’être pour eux. » En écoutant attentivement les personnes atteintes par la maladie et celles qui en prennent soin, son équipe peut formuler des questions de recherche et des approches thérapeutiques qui comptent vraiment pour les communautés qu’elle sert.

Conciliant la rigueur scientifique et le privilège de soutenir les familles, la Dre Bernard trouve un sens dans la découverte et dans les retombées directes sur la patientèle. « Bien sûr, nous voulons progresser le plus rapidement possible », dit-elle. « La recherche est toujours plus lente que nous le souhaiterions, car, dans un monde idéal, le traitement serait prêt dès demain. » Elle considère toutefois que son travail s’inscrit dans un virage à plus grande échelle vers la médecine personnalisée : « Tout ce que nous faisons actuellement mène à des traitements réels et individualisés. C’est déjà le cas, et nous espérons que, bientôt, davantage de familles en bénéficieront. »

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